En bon parent, chacun essaie de maîtriser la consommation télévisuelle de ses enfants. Néanmoins, elle reste difficile à réguler. Notamment dans les familles nombreuses. On se dit souvent que cela distrait, qu’on peut y apprendre pas mal de choses, ou encore que les enfants regardent des programmes adaptés à leur âge. Mais on banalise trop souvent, notamment par manque de certitudes et de connaissances.
Selon de nombreux spécialistes, la consommation télévisuelle des moins de 3 ans engendrera une dépendance vis-à-vis de la télévision, ainsi qu’un frein intellectuel et émotionnel.
Les effets néfastes de la télévision
Les chercheurs du monde entier sont unanimes concernant les méfaits de la télévision sur les plus jeunes. Telle qu’elle est consommée aujourd’hui, elle est néfaste pour le développement des enfants. Elle affecte leur comportement et leur santé. Les enfants sont absorbés par cette « lucarne lumineuse et colorée », comme hypnotisés. Cette petite machine les met réellement dans un état proche de l’hypnose. Lorsque la télévision s’allume, ce sont des ondes lentes qu’on appelle les ondes alpha qui vont remplacer les ondes bêta, qui elles, sont les ondes de l’éveil. C’est le même phénomène qui se produit lorsqu’une personne s’endort.
De plus, lorsqu’un enfant regarde la télévision, c’est l’hémisphère droit du cerveau qui est le plus actif. Cet hémisphère du cerveau traite l’information de façon émotionnelle. Ce qui ne favorise pas l’esprit critique et l’apprentissage. Les effets d’une visualisation excessive de la télévision vont se ressentir à plusieurs niveaux chez les enfants : leur imagination, leur concentration, leur sommeil, leur poids, leur comportement…
Les preuves apportées par les études scientifiques
En ce qui concerne l’imagination des enfants, le pédiatre allemand Peter Winterstein a étudié pendant dix-sept ans les dessins de près de mille neuf cents enfants de 5 et 6 ans.
Résultat : les dessins des enfants qui regardent trop la télévision sont beaucoup plus pauvres en détails que ceux des enfants qui la regardent modérément ou pas du tout.
Côté Néo-Zélandais, une étude a été menée sur un millier de personnes nées entre 1972 et 1973 de tous les niveaux socioculturels. Elles ont été suivies pendant 30 ans. Cette étude a mis en évidence que plus ils ont abusé de la télévision durant leur enfance, moins le niveau d’étude est élevé.
Une autre enquête du gouvernement américain sur la santé et la nutrition des jeunes de 8 à 16 ans a montré que ceux qui passent plus de 4 heures devant la télévision par jour étaient plus obèses que ceux qui y passent moins de deux heures. Le manque d’exercice, le grignotage, les publicités alimentaires, le manque de sommeil altèrent « les mécanismes de la digestion et de l’assimilation des graisses ».
Conséquences émotionnelles de la télévision
Grâce à l’imagerie cérébrale, on sait qu’à force de voir des images violentes, il y a une désensibilisation qui va se développer chez l’enfant. Celle-ci va reproduire une violence sans émotions.
Il faut bien comprendre le terme violence au sens large. Il ne s’agit pas seulement de personnes qui se battent. Beaucoup d’images et de scènes qui nous paraissent anodines, peuvent être traumatisantes pour les enfants. Il faut donc être extrêmement vigilant et essayer, lorsqu’on regarde avec un enfant, de regarder avec un œil innocent. Jusqu’à un certain âge, les parents doivent protéger leurs enfants de la violence du monde des adultes, même s’il s’agit d’actualités.
Il est évident qu’il peut savoir que le monde n’est pas toujours rose, mais avec des mots d’enfant. Il y a cinquante ans, le rapport des enfants au monde était très différent et la télévision a bouleversé ce rapport. De nos jours, les enfants sont immergés dans le monde des adultes très tôt. Et ce, avec sa complexité, ses violences, sa sexualité, ses excès.
Les avis des spécialistes sur la question
Le constat qui ressort très clairement chez les spécialistes, et pour lequel beaucoup d’entre eux se sont battus en France : pas de télévision avant l’âge de 3 ans. Même s’il s’agit d’émissions spécialement conçues pour cet âge. Du fait de l’inactivité et de la passivité devant l’écran, tout ce qu’il fait, c’est regarder et absorber quelque chose qu’il ne comprend pas ou très peu. Il n’interagit pas avec son environnement. Or, à cet âge-là, l’enfant a besoin d’agir sur le monde dans lequel il vit pour se construire et grandir. De plus, les images que les enfants voient à la télévision sont assimilées comme si elles étaient réelles. Il y a une absence de « décryptage » devant certaines images.
Selon de nombreux spécialistes, la consommation télévisuelle des moins de 3 ans engendrera une dépendance vis-à-vis de la télévision, ainsi qu’un frein intellectuel et émotionnel. En plus du dysfonctionnement du langage et des troubles de la concentration.
Quelles mesures prises en France ?
En France, après la commercialisation de Baby TV en 2005 et celle de Baby First en 2007, le CIEM (Collectif Interassociatif Enfance et Média) a lancé une pétition sur internet avec le soutien de nombreux psychologues et spécialistes de l’enfance contre ces chaînes diffusant des programmes pour bébé en continu.
Le CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel) rendra, en 2008, une décision interdisant la commercialisation de chaînes de télévision spécialement conçue pour les moins de 3 ans et imposant aux distributeurs de ces services d’avertir les consommateurs en diffusant ce message : « regarder la télévision peut freiner le développement des enfants de moins de trois ans. Même lorsqu’il s’agit de chaînes qui s’adressent spécifiquement à eux ».
La télévision à partir de quel âge alors ?
Selon le CSA, entre 3 et 6 ans, regarder la télévision peut avoir des vertus pédagogiques, comme apprendre les lettres de l’alphabet. Il conseille, cependant, de regarder plusieurs sessions courtes durant la journée. Et de revoir le même programme pour que l’enfant puisse comprendre ce qu’il voit. Il faut tout de même faire attention à la publicité et aux images diffusées. À cet âge-là, l’enfant ne fait pas encore la différence entre le dessin animé et la publicité, ni entre la fiction et le réel.
Au delà de 6 ans, l’enfant est plus apte à faire la différence entre le réel et la fiction. Tout de même, il vaut mieux qu’il ne regarde que des programmes adaptés à son âge. Les journaux télévisés sont déconseillés jusqu’à l’âge de 8 ans. Au delà de 10 ans et à l’adolescence, les choses se corsent parce que l’enfant ou l’adolescent va vouloir regarder des émissions tout public, qui sont en général très abrutissantes. Il est donc extrêmement important d’être vigilant à ce que l’enfant regarde. En ce qui concerne le temps passé devant la télévision, il varie selon les spécialistes. Ce qui est sûr, c’est qu’en moyenne, en France les enfants passent près de 2h20 devant la télévision par jour, et c’est beaucoup trop !
Les « sans-tv », qui sont-ils et pourquoi ?
Avoir une télévision à la disposition des enfants est une affaire compliquée. Ainsi qu’une grande responsabilité pour les parents. C’est pourquoi certaines familles font le choix de ne pas avoir de télévision. On compte en France environ 1 à 2 % de famille ne possédant pas de télévision. Selon un article du Figaro qui a fait son enquête, la plupart d’entre eux sont diplômés du supérieur :
- 10% de ces gens-là n’ont pas de télévision contre 2% chez les ouvriers.
- 20% sont des enseignants. Il y a aussi beaucoup d’employés administratifs, de professionnels de l’information, de cadres, d’ingénieurs. De plus, les « sans-tv » seraient plus cultivés et sociables que la moyenne.
- 97% parmi eux disent avoir pratiqués une activité culturelle contre 69% des Français.
On comprend ainsi, non pas qu’il serait mieux de ne pas avoir de télévision, mais qu’il s’agit d’un choix délibéré et réfléchi. Celui-ci ne mène pas du tout à un manque de sociabilité et ne crée pas de privation.
Utiliser la télévision de façon saine
Le but est de pouvoir tirer profit de la télévision et surtout la laisser à sa place d’outil. C’est là que se trouve la difficulté. En effet, la télévision n’a pas que des défauts. Elle peut être bénéfique. Beaucoup mettent en avant le fait qu’elle facilite la sociabilité. La télévision informe. On trouve de très bons documentaires qui peuvent être passionnants pour les enfants, et très instructifs. Elle devient ainsi un véritable outil pédagogique et culturel. Les documentaires historiques par exemple peuvent être extrêmement intéressants pour les jeunes qui ont du mal avec l’histoire à l’école. Il y a des émissions scientifiques comme « Ce n’est pas sorcier », ou encore « On n’est pas que des cobayes » qui participent à éveiller et à nourrir la curiosité de l’enfant sur le monde.
Ce qu’il faut retenir :
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- Savoir éteindre la télévision
- Choisir avec l’enfant ce qu’il veut et ce qu’il peut regarder
- Ne jamais laisser l’enfant zapper et de préférence ne pas couper au milieu d’un programme
- Pouvoir enregistrer des émissions
- Éviter de laisser la télévision allumée avec la présence d’un enfant, même s’il joue à côté
- Éviter qu’elle soit à la portée des enfants ou des adolescents
- Visionner avant l’enfant si cela est possible
- Lors des publicités, couper le son et profiter de ces pauses pour discuter
- Faire de votre télévision un outil pédagogique et culturel
La télévision d’aujourd’hui est une véritable bombe qui peut exploser au visage de nos enfants. Elle peut être extrêmement néfaste pour leur développement. Il est donc important de discuter de ce que l’on voit pour ne pas laisser la télévision modeler le cerveau de nos enfants. Il faut éveiller l’esprit critique, susciter les questions en discutant. Il est impératif pour les parents de se rendre compte de cette responsabilité et savoir l’utiliser à bon escient pour le bien de sa progéniture. Nous devons changer nos habitudes et tenir compte des avis des spécialistes.
Sources : lefigaro, cnrs, collectifciem, csa, psychologies